A VOIR et LIRE sur le site "Paul-Louis COURIER, épistolier, pamphlétaire et hélleniste (1772-1825)
Quand il parlait de Paul-Louis Courier, il aimait à rappeler que sa grand-mère fut la dernière personne à avoir vu M. Courier vivant.
« J’ai connu un temps où les paysans vivaient misérablement. Ils vendaient leurs plus beaux produits pour en tirer un peu d’argent et mangeaient des déchets. En travaillant chez eux, je me suis rendu compte de l’exploitation qu’ils subissaient. Leurs maisons étaient toutes délabrées. Dans cette région, alors couvertes de vignes, ils devaient travailler comme des forcenés, bêcher la terre de l’aube jusqu’à la nuit noire. Je suis devenu anarchiste devant le spectacle de pareilles iniquités […]
A quatorze ans, je me suis abonné au Père Peinard, d’Emile Pouget, et j’ai lu ensuite les écrits de Louise Michel, Sébastien Faure, Proudhon et Blanqui. Les œuvres de Paul-Louis Courier, qui vécut ici au début du siècle dernier et défendit les droits des ouvriers agricoles, ont eu aussi une grande influence sur mon évolution. »
A quatorze ans, je me suis abonné au Père Peinard, d’Emile Pouget, et j’ai lu ensuite les écrits de Louise Michel, Sébastien Faure, Proudhon et Blanqui. Les œuvres de Paul-Louis Courier, qui vécut ici au début du siècle dernier et défendit les droits des ouvriers agricoles, ont eu aussi une grande influence sur mon évolution. »
10 avril 1825
En ce beau jour d’avril, quittant la Chavonnière,
Courier partit joyeux vers un cruel destin…
Et Jeannette Moreau, qui devint ma grand’mère,
Le vit passer tout seul au long d’un vert chemin.
« Il marchait à grands pas, chaussé de brodequins,
Et marmonnait des mots qu’on ne comprenait guère… »
Portant « chapeau de paille et pantalon nankin »,
Il dit : Bonjour petite ! en croisant la bergère.
Jeanne, en son cœur d’enfant, garda le souvenir
De celui qui partit, pour ne plus revenir,
Vers l’affreux guet-apens de la forêt prochaine…
Et, jeune homme ou vieillard, j’ai pensé bien des fois
Que le grand pamphlétaire abattu sous un chêne
Eut d’autres assassins que Frémont et Dubois…
Et que l’esprit du mal plane au-dessus des lois.
Monument commémoratif à Véretz (photo JP Lautman)Courier partit joyeux vers un cruel destin…
Et Jeannette Moreau, qui devint ma grand’mère,
Le vit passer tout seul au long d’un vert chemin.
« Il marchait à grands pas, chaussé de brodequins,
Et marmonnait des mots qu’on ne comprenait guère… »
Portant « chapeau de paille et pantalon nankin »,
Il dit : Bonjour petite ! en croisant la bergère.
Jeanne, en son cœur d’enfant, garda le souvenir
De celui qui partit, pour ne plus revenir,
Vers l’affreux guet-apens de la forêt prochaine…
Et, jeune homme ou vieillard, j’ai pensé bien des fois
Que le grand pamphlétaire abattu sous un chêne
Eut d’autres assassins que Frémont et Dubois…
Et que l’esprit du mal plane au-dessus des lois.
(Rencontre avec Eugène Bizeau, article de Pierre Drachline dans Le Monde aujourd’hui, dimanche 29, lundi 30 septembre 1985)
Salut, vieux pamphlétaire…
Salut, vieux pamphlétaire à la plume indomptée !
Vigneron dont le vin réconforte l’esprit…
Salut COURIER ! salut à la libre pensée
Qui répand sa lumière en tes meilleurs écrits !
Pour tes pamphlets, piquants, comme des coups d’épée,
On t’a couvert, jadis, de fange et de mépris ;
Et l’on t’a fait rejoindre, en leur tour désolée,
Ceux qu’on jette en prison pour étouffer leurs cris…
Mais le soleil des temps nouveaux, qui nous éclaire,
Fera germer le grain du bon sens populaire
Qui fustige avec toi les horreurs du passé ;
Fiers de ton idéal, qu’un noble amour féconde,
Libres et fraternels aux quatre coins du monde,
Les peuples dans la paix pourront un jour danser…
Comme «les villageois de Véretz et d’Azay» !
Vigneron dont le vin réconforte l’esprit…
Salut COURIER ! salut à la libre pensée
Qui répand sa lumière en tes meilleurs écrits !
Pour tes pamphlets, piquants, comme des coups d’épée,
On t’a couvert, jadis, de fange et de mépris ;
Et l’on t’a fait rejoindre, en leur tour désolée,
Ceux qu’on jette en prison pour étouffer leurs cris…
Mais le soleil des temps nouveaux, qui nous éclaire,
Fera germer le grain du bon sens populaire
Qui fustige avec toi les horreurs du passé ;
Fiers de ton idéal, qu’un noble amour féconde,
Libres et fraternels aux quatre coins du monde,
Les peuples dans la paix pourront un jour danser…
Comme «les villageois de Véretz et d’Azay» !
Au champion du bon sens et de la liberté…
Courier, « vil pamphlétaire », osa dire un ilote
Qui fut toqué d’hermine et procureur du roi,
Ton nom reste plus haut qu’un étendard qui flotte…
Et fait briller les yeux qui sont tournés vers toi !
Aussi, pour célébrer ton double centenaire,
Les fleurs du souvenir viennent de toutes parts ;
Et rien ne reste plus du triste mercenaire
Que les mots pleins de fiel d’un chatfourré blafard…
Ceux que tu défendais n’avaient ni bois, ni terres,
Ni pavillons blottis dans les bosquets ombreux ;
C’étaient des paysans, c’étaient des prolétaires
Qu’on écrasait d’impôts et qui restaient des gueux.
Ces manants affranchis ne payaient plus la dîme ;
Depuis Quatre-vingt-neuf leur sort avait changé,
Mais ils étaient brimés par l’insolent régime
Où régnaient la noblesse et le très haut clergé.
Vignerons tourangeaux ou maçons de la Creuse,
Mal nourris, mal vêtus, traités comme un bétail,
Ils n’avaient même pas la liberté joyeuse
De danser quelquefois sous les tilleuls du Mail.
Le droit qu’on leur donnait c’était de ne rien dire
Contre l’autorité des bourboniens repus,
Contre leurs estafiers qui se faisaient maudire
En étouffant la voix des éternels vaincus.
Au rythme des saisons, c’étaient toujours les mêmes
Qui se courbaient sans fin sur un labeur ingrat ;
« Leurs gestes de semeurs » étaient de beaux poèmes :
- Et c’est Victor Hugo, plus tard, qui le dira…
Mais quand ils avaient fait la moisson la vendange,
Monté dans les greniers les sacs remplis de blé,
On leur fermait au nez les portes de la grange,
On verrouillait la cave à triple tour de clé !
Courier, nous t’admirons, nous, les gens du village
Où chacun parle haut sans fermer les volets,
Pour ce qu’on appelait tes « écarts de langage »,
Pour ton « Simple discours », tes lettres, tes pamphlets !
Et malgré le regain des basses calomnies
Qui voudraient salir l’homme et flétrir l’écrivain,
Pour « Daphnis et Chloé », pour leur grâce infinie,
Nous aimons l’helléniste et sa vigne et son vin…
Entre la Chavonnière et Sainte-Pélagie,
Que de tourments cruels en ton cœur angoissé,
Jusqu’au jour où survint l’horrible tragédie
Dans ce qui fut jadis ta forêt de Larçay !
Servir les pauvres gens fut ta plus noble gloire,
L’apostolat d’un juste au sort immérité,
Qui fut et qui demeure au livre de l’histoire
« Le champion du bon sens et de la liberté ».
Courier, d’un cœur ému, j’épands des fleurs nouvelles
Sur le tombeau glacé qui fut ton dernier lit…
On a voulu sur toi jeter l’ombre et l’oubli,
Mais tu restes vivant dans ton œuvre immortelle !
Qui fut toqué d’hermine et procureur du roi,
Ton nom reste plus haut qu’un étendard qui flotte…
Et fait briller les yeux qui sont tournés vers toi !
Aussi, pour célébrer ton double centenaire,
Les fleurs du souvenir viennent de toutes parts ;
Et rien ne reste plus du triste mercenaire
Que les mots pleins de fiel d’un chatfourré blafard…
Ceux que tu défendais n’avaient ni bois, ni terres,
Ni pavillons blottis dans les bosquets ombreux ;
C’étaient des paysans, c’étaient des prolétaires
Qu’on écrasait d’impôts et qui restaient des gueux.
Ces manants affranchis ne payaient plus la dîme ;
Depuis Quatre-vingt-neuf leur sort avait changé,
Mais ils étaient brimés par l’insolent régime
Où régnaient la noblesse et le très haut clergé.
Vignerons tourangeaux ou maçons de la Creuse,
Mal nourris, mal vêtus, traités comme un bétail,
Ils n’avaient même pas la liberté joyeuse
De danser quelquefois sous les tilleuls du Mail.
Le droit qu’on leur donnait c’était de ne rien dire
Contre l’autorité des bourboniens repus,
Contre leurs estafiers qui se faisaient maudire
En étouffant la voix des éternels vaincus.
Au rythme des saisons, c’étaient toujours les mêmes
Qui se courbaient sans fin sur un labeur ingrat ;
« Leurs gestes de semeurs » étaient de beaux poèmes :
- Et c’est Victor Hugo, plus tard, qui le dira…
Mais quand ils avaient fait la moisson la vendange,
Monté dans les greniers les sacs remplis de blé,
On leur fermait au nez les portes de la grange,
On verrouillait la cave à triple tour de clé !
Courier, nous t’admirons, nous, les gens du village
Où chacun parle haut sans fermer les volets,
Pour ce qu’on appelait tes « écarts de langage »,
Pour ton « Simple discours », tes lettres, tes pamphlets !
Et malgré le regain des basses calomnies
Qui voudraient salir l’homme et flétrir l’écrivain,
Pour « Daphnis et Chloé », pour leur grâce infinie,
Nous aimons l’helléniste et sa vigne et son vin…
Entre la Chavonnière et Sainte-Pélagie,
Que de tourments cruels en ton cœur angoissé,
Jusqu’au jour où survint l’horrible tragédie
Dans ce qui fut jadis ta forêt de Larçay !
Servir les pauvres gens fut ta plus noble gloire,
L’apostolat d’un juste au sort immérité,
Qui fut et qui demeure au livre de l’histoire
« Le champion du bon sens et de la liberté ».
Courier, d’un cœur ému, j’épands des fleurs nouvelles
Sur le tombeau glacé qui fut ton dernier lit…
On a voulu sur toi jeter l’ombre et l’oubli,
Mais tu restes vivant dans ton œuvre immortelle !
Max-Olivier Bizeau chante Paul-Louis Courier
Max-Olivier Bizeau
Max-Olivier Bizeau
i-Tourangeau, mi-Auvergnat, Parisien d’adoption sur la colline de Saint-Cloud, Max-Olivier Bizeau fut enseignant puis haut-fonctionnaire, rue Saint-Dominique et Quai d’Orsay. Il anima avec lustre les Jeux Floraux de Touraine, au Prieuré de Saint-Côme, dernière demeure de Ronsard, aux châteaux de Loches et d’Artigny. Membre de Poésie sur Seine et d’Art et Poésie de Touraine, il est l’auteur de six recueils préfacés par Paul Guth, Françoise Chandernagor, Edmonde Charles-Roux, Yves Bonnefoy…, illustrés en couverture par Léonor Fini, Cabu, Piem…
Le dernier, Carré de dames, est remarqué par cinq maires dont celui de Tours, Jean Germain.
Max Bizeau, né en 1918 est le fils d’Eugène Bizeau, poète libertaire dont s’honore le Val de Loire. Il a conservé la maison de ses parents au cœur de Véretz.
Le dernier, Carré de dames, est remarqué par cinq maires dont celui de Tours, Jean Germain.
Max Bizeau, né en 1918 est le fils d’Eugène Bizeau, poète libertaire dont s’honore le Val de Loire. Il a conservé la maison de ses parents au cœur de Véretz.
Paul-Louis Courier
(Un destin)
(Un destin)
Intraitable juste, sinon insigne sage
A-t-il jamais eu vent de la boutade
Du Vert-Galant, contraint de fuir les quais du Louvre :
« Je regretterai ma femme… et la messe ! »
De cet empire des jupons et des soutanes
Paul-Louis se moqua comme d’une guigne
Du verger de la Chavonnière
Pamphlétaire craint, il va s’insurger
Contre tous les abus d’un clergé à la dîme
Qui vide les bals de village
Pour emplir ses chapelles, à l’heure de l'office
Au grand dam des danseurs rustiques
Férus d’accordéon, plus que de grandes orgues
Hobereau bourru, peu lui chaut d’être galant
Il enlève à Paris la jolie citadine
Dont il fera une tourangelle forcée
Trop jeune pour lui, non pour son valet.
Courier, abattu en forêt comme un gibier !
Au plomb, lui qui nargua les balles autrichiennes
Fut-ce jalousie d’amant fruste
En déguisement d’un obscur complot
Qu’annonçait la prophétique menace :
« Prends garde Paul-Louis, les cagots te tueront » !
Décembre 2009
A-t-il jamais eu vent de la boutade
Du Vert-Galant, contraint de fuir les quais du Louvre :
« Je regretterai ma femme… et la messe ! »
De cet empire des jupons et des soutanes
Paul-Louis se moqua comme d’une guigne
Du verger de la Chavonnière
Pamphlétaire craint, il va s’insurger
Contre tous les abus d’un clergé à la dîme
Qui vide les bals de village
Pour emplir ses chapelles, à l’heure de l'office
Au grand dam des danseurs rustiques
Férus d’accordéon, plus que de grandes orgues
Hobereau bourru, peu lui chaut d’être galant
Il enlève à Paris la jolie citadine
Dont il fera une tourangelle forcée
Trop jeune pour lui, non pour son valet.
Courier, abattu en forêt comme un gibier !
Au plomb, lui qui nargua les balles autrichiennes
Fut-ce jalousie d’amant fruste
En déguisement d’un obscur complot
Qu’annonçait la prophétique menace :
« Prends garde Paul-Louis, les cagots te tueront » !
Décembre 2009
Véretz (an 2000)
Véretz, mon beau village
Ne mésestime les attraits
Dont la nature et l’homme t’ont pourvu
Ton mail et sa rampe d’enclos
Contenant ses ormes
Bacchus, fontaine à tête d’angelot
Pudique émule d’un certain Manneken-piss
Ton clocher dont le coq hardi
Outragé jadis par des Prussiens désœuvrés
Annonçait la pluie disaient les anciens
Quand il regardait vers les poules à Auger
Et, dame assise prenant ses aises
Ton église reculant vers la chaussée
Cette rue chaude autrefois dévolue
Au repos du marinier…
Ton école Jules Ferry devenue maison commune
A hauteur d’un château aux riches heures
Se mirant dans le Cher
Où prenait bain la belle Gabrielle
Que son royal visiteur aimait succinctement lavée
Ton vieux pont aux voutes de cave à vin
Ton champ clos où dorment ceux que j’aimais
Garde ta quiète apparence
Crains qu’une insidieuse capillarité
Ne te change au fil des jours, en banale banlieue
Que jamais ne se galvaude ton titre de village
Toi qui t’honores d’un médaillon de Paul-Louis
Chantre de ces paysans qu’on empêchait de danser
Le dimanche, à l’heure des vêpres…
(Extrait de L’orchidée rouge, Christian Pirot, 2004)
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