lundi 19 novembre 2012

GENTIOUX 11 novembre 2012

Suite au 24ème rassemblement pacifiste de Gentioux du 11/11/2012, vous voudrez bien trouver ci-dessous pour information, le discours du Secrétaire Général de notre fédération nationale.
Vous trouverez également en pièce –jointe notre communiqué du 9/11/12 sur la réhabilitation des fusillés pour l’exemple.


Salutations laïques.

Site internet de notre fédération nationale pour compléter votre information:
    


Discours de David Gozlan,
secrétaire général de la Libre Pensée,
devant le monument aux morts de Gentioux
(Creuse), le 11 novembre 2012
Amis, citoyennes, citoyens, camarades,
Je vous apporte le fraternel salut de la Fédération Nationale de la Libre Pensée et de la Fédération Nationale Laïque des Associations des Amis des Monuments Pacifistes, Républicains et Anticléricaux.
Nous sommes réunis pour la réhabilitation des Fusillés pour l'exemple, une réhabilitation collective des Fusillés pour l'exemple. Ni grâce, ni pardon, mais simplement la justice pour ces hommes. Ces 650 fusillés sont les victimes de la folie collective qui s'est emparée de l'Europe, notre réponse, celle qui doit être celle des hautes autorités, c'est la réhabilitation collective des 600 exécutés à qui la République n’a pas encore rendu justice. La cause de la réhabilitation des Fusillés pour l'exemple est à prendre en bloc, sinon elle n'a pas de sens, c'est un acte de justice d'Etat qui est demandé et non pas la conclusion d’enquêtes individuelles.
Oui, Amis, citoyennes, citoyens, camarades, nous sommes contre le « cas par cas » avec l'idée que : « Mieux vaut un coupable innocenté, qu’un innocent toujours condamné. C’est toute l’histoire de notre pays, depuis Voltaire et ensuite la Révolution française, qui a fondé ce principe. Comment rouvrir des dossiers dont un grand nombre a disparu sous les aléas de l’Histoire ? 20% des dossiers des Fusillés pour l'exemple sont détruits ; dans ceux qui restent, dans des procès truqués dont la décision était déjà prise avant la tenue même des Conseils de guerre, les seules pièces à la disposition sont les témoignages à charge des Officiers qui n’avaient pour seul but que de faire condamner les soldats. L’impartialité de la Justice ne pourra donc être mise en œuvre : il n’y a plus de témoins dignes de ce nom. »
Demander une réhabilitation judiciaire ne peut donc être une réponse adaptée à l’injustice commise. Cela pourrait constituer un faux fuyant pour tous ceux qui refusent, ici ou là, que la justice soit rendue aux Fusillés pour l’exemple. Nous ne voulons pas de ce marché de dupes : une étude judiciaire aux résultats improbables pour un semblant de justice. Nous repoussons cette tromperie qui ferait traîner, encore plus le dossier des fusillés pour l'exemple.
Amis, citoyennes, citoyens, camarades,
Avant que l'Europe plonge dans la barbarie la plus inimaginable, où les hommes, ouvriers et paysans, se battaient contre la mort, le désespoir et les ordres, mais aussi contre leurs frères sans comprendre, ni pourquoi, ni pour qui ; avant cette haine, des femmes et des hommes se sont dressés contre la guerre. Aujourd'hui, nous savons l'horreur de cette guerre, la chape de plomb de la censure a été brisée par la volonté continue des citoyens. Nous savons et nous comprenons le désarroi, le refus de l'horreur, la peur du front.
Parmi ces femmes et hommes refusant la guerre, déjà le 25 juillet 1914, le citoyen Jean Jaurès s'adressait ainsi : "Citoyens, si la tempête éclatait, tous, nous socialistes, nous aurons le souci de nous sauver le plus tôt possible du crime que les dirigeants auront commis et en attendant, s’il nous reste quelque chose, s’il nous reste quelques heures, nous redoublerons d’efforts pour prévenir la catastrophe. Déjà, dans le Vorwaerts, nos camarades socialistes d’Allemagne s’élèvent avec indignation contre la note de l’Autriche et je crois que notre Bureau Socialiste International est convoqué.
Quoi qu’il en soit, citoyens, et je dis ces choses avec une sorte de désespoir, il n’y a plus, au moment où nous sommes menacés de meurtre et de sauvagerie, qu’une chance pour le maintien de la paix et le salut de la civilisation, c’est que le prolétariat rassemble toutes ses forces qui comptent un grand nombre de frères, Français, Anglais, Allemands, Italiens, Russes et que nous demandions à ces milliers d’hommes de s’unir pour que le battement unanime de leurs cœurs écarte l’horrible cauchemar.
J’aurais honte de moi-même, citoyens, s’il y avait parmi vous un seul qui puisse croire que je cherche à tourner au profit d’une victoire électorale, si précieuse qu’elle puisse être, le drame des événements. Mais j’ai le droit de vous dire que c’est notre devoir à nous, à vous tous, de ne pas négliger une seule occasion de montrer que vous êtes avec ce parti socialiste international qui représente à cette heure, sous l’orage, la seule promesse d’une possibilité de paix ou d’un rétablissement de la paix."
Loin de rechercher les motivations de l'assassin Raoul Villain, il y a un fait : Jaurès est le premier exécuté pour l'exemple. Le premier de cette guerre. Il a levé la tête pour éviter la guerre, il en a payé de sa vie. Il est le premier homme victime de la boucherie, avant ce soldat qui s'élance dans la plaine, et dont la vie sera fauchée dans le premier assaut. Il est le premier exécuté sommairement sans l'ombre d'un jugement. Il a de commun aussi avec les Fusillés pour l'exemple, de s'être élevé contre la barbarie, l'infamie, la guerre. Chacun à son niveau, mais poussés par le même refus de mourir, le même désir de vivre.
« Pourquoi ont-ils tué Jaurès » demandait Jacques Brel ? La réponse tragique est : pour en tuer des millions d’autres, et pas toujours sous les balles dite « ennemies ». C’est l’horreur des Fusillés pour l’exemple que l’assassinat de Jean Jaurès a préfiguré.
Ils ont de commun que les assassins, les bourreaux engallonés des Fusillés pour l'exemple Et Raoul Villain pour Jaurès, sont remerciés par la patrie. A l'acquittement de l'assassin de Jaurès, Anatole France écrit : "Travailleurs, Jaurès a vécu pour vous, il est mort pour vous. Un verdict monstrueux proclame que son assassinat n’est pas un crime. Ce verdict vous met hors la loi, vous et tous ceux qui défendent votre cause. Travailleurs, veillez."
Jaurès assassiné !
Des ouvriers et paysans de France, fusillés pour l'exemple ! C'est cette même génération qui a été sacrifiée pour les intérêts des marchands de canon. Comment comprendre que ceux qui se targuent d’être « le Parti de Jaurès » ne réhabilitent pas au plus vite les camarades de Jaurès, tous ceux qui sont tombés après lui ?
Le refus de l'ignominie doit être réparé, il doit être reconnu pour être condamné. Et vous avez ce pouvoir, Monsieur le Président de la République. Vous avez ce pouvoir. Vous avez le pouvoir de réhabiliter collectivement les Fusillés pour l'exemple.
Amis, citoyennes, citoyens, camarades,
Depuis plus de dix ans, la Fédération Nationale de la Libre Pensée et ses Fédérations départementales se battent au côté de la Ligue des droits de l'Homme, de l'ARAC, du Mouvement de la Paix et de l'Union Pacifiste pour cette réhabilitation. Dans cette période, ce qui devrait être possible aux plus hauts sommets de l'Etat, a été réalisé dans nos communes, nos départements : 17 Conseils généraux, 3 Conseils régionaux et plusieurs conseils municipaux. Le conseil régional de Champagne-Ardenne a émis le vœu suivant en juin dernier, je vous en donne quelques extraits : "Durant la première guerre mondiale, 2 400 soldats français ont été condamnés lors de jugements expéditifs et arbitraires rendus par des conseils de guerre spéciaux, pour refus d’obéissance, abandon de poste ou mutinerie. Plus de 650 d’entre eux ont été « fusillés pour l'exemple », dont de nombreux Champardennais. Ces « fusillés pour l'exemple » sont morts pour la France et par la France. Ils n'étaient pas des lâches, comme les autorités militaires ont voulu le faire croire. Ils se sont insurgés devant l’hécatombe, contre les échecs répétés des assauts sous la mitraille.(...) Tous ces hommes ont été injustement dépossédés de leur honneur. Il appartient à la République de la leur rendre et de réparer cette injustice comme le demandent leurs descendants et nombre d'associations. Le Conseil régional apporte son soutien à cette réhabilitation pleine, publique et collective de tous les « fusillés pour l'exemple » de la guerre de 1914-1918 et demande au Président de la République de prendre une décision forte en ce sens."
L'histoire n'a pas besoin d'être réécrite, elle se suffit à elle-même. Elle est nécessaire pour comprendre. C'est pourquoi la dernière duperie qu'est la loi Laffineur est un étrange mélange des genres, une loi fourre-tout où toutes les guerres se vaudraient, les commémorations ne seraient qu'une. La loi Laffineur, c'est le début de l'oubli, l'amputation de la mémoire, la condamnation d’une compréhension de l'histoire. La loi Laffineur ouvre la célébration des guerres sans en distinguer le fond et les formes : guerres impérialistes, guerres coloniales.
Alors que le 11 novembre marquait traditionnellement le refus de la guerre, la volonté que c’était « la der des der », et que « plus jamais cela », la loi Laffineur indique clairement que la seule perspective ouverte à notre pays, ce sont « les opérations extérieures », nouveau nom des guerres de conquête coloniale. Comment ne pas penser alors à Robespierre qui disait que « les peuples n’aimaient jamais les missionnaires armées » ?
Qui peut traverser notre pays sans voir ces blocs de souffrances élevés à la mémoire de nos pères? Qui peut parler à la jeunesse en oubliant le sang versé des révoltés, des insoumis, des rebelles, des hommes simples tout simplement effrayés de ne plus voir les siens ? Qui peut comprendre alors les boucheries d'hier pour ne plus les réitérer ? Aujourd'hui encore, les guerres amènent leur lot de destruction et de désolation, les troupes en Afghanistan, celles d'autres pays en Irak ne savent même pas pourquoi elles sont dans un pays qui n'est pas le leur.
A travers plus de cinquante rassemblements dans toute la France, avec des milliers de pacifistes internationalistes réunis en ce jour, c'est à vous, Monsieur le Président de la République que nous nous adressons, la réhabilitation collective des Fusillés pour l'exemple est un acte politique nécessaire.
Les plaies doivent finir d'être pansées. Il est venu le temps de tourner ce tragique chapitre de notre histoire, de faire revenir l'honneur de ces hommes et de leurs familles dans le giron de la République.
A bas la guerre ! A bas toutes les guerres !
Maudite soit la guerre !
Réhabilitation collective et immédiate de tous les Fusillés pour l'exemple
Je vous remercie

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