vendredi 10 juillet 2015

Anne Adélaïde CHAMBONNIERE, épouse BIZEAU

Anne Adélaïde CHAMBONNIERE, épouse BIZEAU, 
institutrice syndicaliste ,libertaire, pacifiste et féministe 
(1882 - 1973)

Si la mémoire collective a retenu le nom d'Eugène BIZEAU, poète anarchiste, pacifiste, anticlérical, vigneron, décédé en 1989 à l'âge de 106 ans dans sa Touraine natale, le nom de sa compagne, Anne BIZEAU mérite d'être honoré à plus d'un titre.
Adélaïde, Anne CHAMBONNIERE née à Trémouille, petit village du Cantal, le 22 mars 1882. Après avoir suivi ses études en École Primaire Supérieure et brillamment obtenu le Brevet Supérieur, elle devient institutrice à Menet (Cantal).
Le syndicalisme étant interdit aux fonctionnaires, comme la plupart des instituteurs, elle fait partie d'une amicale et devient en décembre 1912, secrétaire-adjointe de l'Amicale des membres de l'Enseignement Primaire Public du Cantal.
Parallèlement aux amicales qui sont sous la coupe des Inspecteurs d'Académie, les instituteurs combattent pour une vraie syndicalisation liée au mouvement ouvrier.
Anne CHAMBONNIERE, avec d'autres instituteurs se reconnaît dans le « Manifeste des Instituteurs Syndicalistes » (1905) qui revendique l'indépendance du corps enseignant par rapport à l'Etat représenté par les Inspecteurs d'Académie :
« ...Le corps des instituteurs a besoin de toute son autonomie (…) qui ne peut être réalisée que par la constitution en syndicats des associations professionnelles d'instituteurs (…) décidés à se substituer à l'autorité administrative impuissante devant les ingérences politiques (…). Les instituteurs réclament le droit de se constituer en syndicats, entrer dans les bourses du travail. Ils veulent appartenir à la Confédération Générale du Travail. Par leurs origines, par la simplicité de leur vie, les instituteurs appartiennent au peuple... ».
Tout en étant par « obligation professionnelle » tenue de rester dans l'amicale, elle va adhérer, suite au Congrès de Nantes (mars 1907), à la « Fédération Nationale des Instituteurs et Institutrices à la CGT » qui deviendra en 1915 le « Syndicat des instituteurs » faisant paraître la revue « L'émancipateur ».
Mais depuis longtemps, parallèlement à l'action syndicale, Anne s'investit dans le combat féministe. Elle fonde le  Groupe féministe cantalien » dont elle sera la secrétaire durant de nombreuses années, en particulier durant la guerre de 1914 – 1918, où ce groupe prendra des positions solidaires envers les institutrices réprimées pour dénonciation de l'état de guerre, pour appel à la paix etc.
En 1916, son parcours de féministe et de pacifiste se radicalise, influencé en partie par sa rencontre et mariage avec Eugène BIZEAU dont elle partage les idées.
Le couple s'installe à Massiac dans le Nord Cantal, où elle est nommée directrice de l'école maternelle. Le couple aura deux enfants, Max et Claire.
En 1919, elle fondera le syndicat départemental de l'enseignement dont elle assurera le secrétariat de 1919 à 1924. Anne BIZEAU s'intéressera particulièrement à la dénonciation des livres scolaires chauvins, prônant le nationalisme et le patriotisme.
Mais nous sommes en juillet 1917. Dans la France en guerre depuis trois ans la chasse aux instituteurs pacifistes, ouverte depuis des mois s'intensifie à coup de poursuites judiciaires et de révocations. Aussi, Anne BIZEAU au sein de l'amicale, comme dans le syndicat, mène inlassablement des campagnes de solidarité en faveur des enseignants poursuivis, condamnés et révoqués pour délit d'opinion, défaitisme, comme les époux MAYOUX par exemple.
Ceux-ci, instituteurs pacifistes ont eut le tord de faire paraître une petite brochure intitulée :  « Les instituteurs syndicalistes et la guerre » ce qui leur a valu d'être suspendus de leur fonction.
Immédiatement Anne BIZEAU réagit dans un article du journal de l'Amicale :
« Le Conseil d'administration de l'amicale, considérant que les camarades Mayoux ont été révoqués pour délit d'opinion demande l'amnistie et la réintégration dans l'enseignement... ».
Dans la même période, elle va mobiliser les Amicales et les syndicats du Cantal pour défendre d'autres instituteurs réprimés pour avoir exprimé leur pacifisme, comme Gabrielle BOUET ou Hélène BRION. Cette dernière, institutrice, porte-parole du courant pacifiste au sein de la CGT., est empêchée par la police de se rendre à la conférence pacifiste de Zimmerwald (1915). Son domicile est perquisitionné en juillet 1917, elle est suspendue sans traitement avant d'être arrêtée en novembre pour « propagande défaitiste » et incarcérée dans la prison des femmes de Saint-Lazare.

Eugène BIZEAU lui consacrera un poème :
« Vous disiez avec foi : « La guerre est un fléau »
Désarmons la rancoeur humaine
Au lieu d'entretenir le culte de la haine
Donnons à la jeunesse un idéal plus beau... »

Anne BIZEAU n'a pas attendu de rencontrer son compagnon Eugène pour s'adonner à la poésie. Après un premier recueil, « Les ailes de soie », elle fait paraître un deuxième livre, « Souvenance », préfacé par Paul GUTH, qui la surnomme la « Fée d'Auvergne ».

Dans ce livre, elle se souvient de son frère, mort à la guerre en 1917, et crie son antimilitarisme dans « Le temps des folies » (extrait) :
« (…) Ils attendaient qu'on les désarme
Ces enfants de leur chair meurtrie,
On les coucha dans la prairie,
Ah ! Maudit soit le temps des armes... »

Même opposition à la guerre, dans le poème « Ils sont tombés » (extrait) :
« Ils sont tombés comme les blés
Les gars si fiers de leurs vingt ans
Ils sont tombés comme les blés
Sans avoir mangé leur pain blanc !
Ils sont tombés comme des fruits,
des fruits amers en leur verdeur,
Ils sont tombés comme des fruits,
Sans épuiser tous les bonheurs... »


Ou encore, « Automne 1914 » (extrait) :
« ...Les hommes tombent follement
Dans le vent qui souffle en rafales
C'est la chanson des noirs autans
Les balles sifflent sur les dalles
Sifflent, mortelles dans le vent
Les hommes tombent follement ».

Avec Eugène, son compagnon elle aura partagé les combats émancipateurs.
Tous deux ont été également des passionnés de poésie durant toute leur vie, et le virus de la poésie aura été transmis à leur fils Max qui a édité trois recueils de poèmes et un livre « Au nom d'un fils », avec des dessins de CABU, qui illustra également les recueils du père, Eugène BIZEAU : « Verrues sociales », « croquis de la rue » et « Guerre à la guerre ».

A la fin de la première guerre mondiale, le couple BIZEAU, infatigable, participera au combat pour les amnisties des réfractaires à la guerre, avec les syndicalistes et les révolutionnaires, et soutiendra le combat pour la réhabilitation des fusillés pour l'exemple.

Poème « Amnistie » (extrait) :
« Amnistie ! Amnistie aux soldats en révolte
Contre l'autorité brutale et désinvolte
Qui leur mit sur le corps des guenilles sans nom
Pour qu'ils soient « jusqu'au bout » de la chair à canon !
Amnistie ! Amnistie à tous les réfractaires
Qui n'ont pas accepté les jougs héréditaires
Et qui n'ont pas servi, comme des instruments
Les projets monstrueux de leurs gouvernements !... »

Une sacrée famille, je vous l'assure !
Pacifiste, antimilitariste, féministe, syndicaliste et libertaire, Anne méritait bien d'être honorée !

Michel Di Nocera,
secrétaire de l'Association Laïque des Amis d'Anne et Eugène BIZEAU*

  • L'Association rend hommage aux Bizeau, chaque année, à Massiac (Cantal) durant lequel se tient une conférence, éditée ensuite dans les « Cahiers Anne et Eugène BIZEAU ».
  • Pour plus d'informations, le blog de l'Association : http://lesamisdebizeau.blogspot.fr/


mercredi 8 juillet 2015

Famille BIZEAU en 1926

Eugène Bizeau, sa femme Anne, la grand-mère paternelle et les deux enfants, Max et Clairette. La photographie a été prise à Massiac en 1926

dimanche 5 juillet 2015

Nouveautés


Deux rubriques sont à votre disposition sur ce blog :
- Poésie pacifiste
- Figures du pacifisme : femmes et hommes politiques, syndicalistes, internationalistes

jeudi 2 juillet 2015

« Les femmes dans le mouvement ouvrier durant la guerre de 1914/1918 »

l'Association Laïque des Amis d'Anne et Eugène BIZEAU* organise le XXV ème hommage aux BIZEAU
le Dimanche 11 octobre 2015 à MASSIAC (Cantal) – 

 « Les femmes dans le mouvement ouvrier 

durant la guerre de 1914/1918 »
Conférence d'Evelyne PAILLARD, syndicaliste

A peine les crédits de guerre votés, René VIVIANI, alors Président du Conseil lance le 7 août 1914, un appel : « Debout, femmes françaises, jeunes enfants filles et fils de la patrie ! Remplacez sur le champ du travail ceux qui sont sur les champs de bataille (…) Debout, à l'action, au labeur ! ! Il y aura demain de la gloire pour tout le monde ! ».
Durant la guerre de 1914/1918, les femmes vont subir de plein fouet l'exploitation capitaliste dans les usines et dans les champs.
Pour leur part Anne et Eugène BIZEAU soutiendront la lutte des pacifistes internationalistes.
Notez dès à présent cette date ! Une invitation à la conférence, avec fiche de réservation, ainsi que l'appel à cotisation 2015/2016 sera envoyée début septembre.

Comme chaque année, la conférence est suivie d'un apéritif et d'un repas fraternel
Renseignements et inscriptions au 04 71 68 23 67 ou nicolefourcade15@orange.fr
Siège social : 48, Avenue Edouard Herriot – 43100 BRIOUDE – 04 71 50 04 27
* Association adhérente à l'Association Laïque des Amis des Monuments Pacifistes, Laïques, Républicains et Anticléricaux